Réalisation : Robert Rodriguez
Scénario : Robert Rodriguez, Max Borenstein
Acteurs Principaux : Ben Affleck, Alice Braga, Hala Finley, William Fichtner
Sortie : 23 août 2023
Durée : 1 h 30
Genres : Action, Thriller
Sociétés de productions : Solstice Studios, Double R Productions, Studio 8, Ingenious Media et Hoosegow Productions
Société de distribution : SND (France)
Robert Rodriguez est un éternel consommateur de cinéma en tout genre. Cela transpire de son cinéma depuis son premier film, à savoir El Mariachi (1992), Une petite série B sans grande prétention, assumant l’héritage de son passé de vadrouilleur des vidéoclubs. Cependant, la suite s’est révélée être en dents de scie, avec des résultats parfois réjouissants comme Une nuit en enfer (1996) ou encore The Faculty (1998), mais aussi des plaisanteries grotesques aux choix fortement discutables, notamment avec la saga Spy Kids. Ce réalisateur, capable ainsi du meilleur comme du pire, nous revient donc aujourd'hui avec un nouveau long-métrage.
Résumé :
"Danny Rourke (Ben Affleck) est un inspecteur de la Austin Police Department, dont la fille, âgée de 7 ans a disparu. Cette affaire fortement médiatisée n’a jamais trouvé de résolution. Lors d’un braquage d’une banque, Rourke observe des comportements étranges et se retrouve face à un homme mystérieux (William Fichtner), capable d’hypnotiser les gens rien qu’en leur donnant des ordres. Il doit fuir en compagnie d'une voyante du nom de Diana (Alice Braga) qui a des connaissances sur ces mystérieux Hypnotics."
Critique :
À la recherche d’une quelconque démarche cinématographique
Hypnotic possède un sentiment de « déjà-vu » et pas seulement par l’expression. Le film débute par une succession d’images symboliques, à la portée du premier spectateur venu. La petite fille courant dans un parc, puis un insert sur un jouet d'enfant et le souffle du vent, comme pour marquer le basculement vers la disparition de la fille, emporté par celui-ci. On pourrait de suite penser à une symbolique provenant du cinéma de Tony Scott, avec des films comme Man on Fire (2004), avec un élément symbolisant une enfant ou l’introduction avec la destruction du bateau au début de Déjà-Vu (2006). Malheureusement, la voix rocailleuse de Ben Affleck, accompagnée d'un jeu inexpressif tout droit sorti d’un terrible film d’action "Direct-to-video", fait tomber comme un soufflet un élan rare de mise en scène offert par le cinéaste de Sin City (2005).
Ben Affleck dans toute sa splendeur inanimée
La traversée du cinéma d’action est une des caractéristiques de ce film et se dévoile vraiment poussiéreuse. Notamment, on peut déceler une grammaire filmique située à la frontière entre les productions Captain America (les 2ème et 3ème opus) du Marvel Cinematic Universe et le découpage schématique d’un film avec Steven Seagal. Cette fameuse grammaire pouvant être résumée à : "un cut égale une action", même si l'on peut voir une tentative, avec l’explosion d’un camion filmée sous plusieurs angles de caméra, de faire écho, encore une fois, au style de Tony Scott. Le résultat de ce démarrage de long-métrage s’avère fade et sans réelle idée. Un parcours essoufflé du film hollywoodien, sous forme de dialogues pompeux et fonctionnels sur les éléments de l’intrigue. Tout ne sert qu'à raconter l’histoire que Rodriguez veut nous délivrer, avec une heure trente au compteur. Ces conditions sont compliquées pour donner ne serait-ce qu’une petite dose d’épaisseur aux dilemmes des protagonistes. Elle n'est ainsi pas accompagnée par une cinématographie qui pourrait nous raconter d’ elle-même les éléments concernant les "Hypnotics" .
Un plein de citations filmiques, s'il vous plaît ?
Quand des protagonistes opèrent un voyage, le tout est généralement poussé par des éléments contraignants, et leur voulant du mal. Il y a ainsi deux cas de figures possibles qui se dévoilent. Soit l’écriture du film effectue un développement de ses personnages, un road trip qui sert seulement de cargaison pour empiler les explications assourdissantes concernant les concepts d’un film. Pour notre plus grand malheur, c'est ce deuxième cas qui est ici choisi. Le personnage dans son état facial mortuaire qu’est Rourke est accompagné de Diana, qui correspond à l'archétype de relais explicatif pour les éléments conceptuels du long-métrage. Au bout d’un moment, se dévoile un autre film, celui qui a été pensé en faisant les poches du coté de Christopher Nolan, et particulièrement son Inception (2010). Détrousseur de l'extrême, Rodriguez réutilise notamment l’idée du ciel qui se rabat en direction du sol. Au vu des séquences qui précèdent ce moment pivot du voyage référentiel, il en reproduit aussi les longues tirades explicatives, pour notre plus grand désarroi. Une vague tentative d'hommage qui passe pour une reproduction, sans l'éclat et les idées premières de ces dites séquences.
Néanmoins, ce virage aurait pu être le signe d’une série B, jouant sur la méfiance de ce qui se déroule sous les yeux du personnage, ne pouvant plus se fier à ce qu'il voit. Une curiosité qui se révèle finalement très vite n'être qu'un fourre-tout de références, dans lequel on ne parvient pas à déceler si les éléments matériels ou le montage paranoïaque d’apparitions et de disparitions, sont les clés d’une quelconque ligne de départ pour un chemin d’idées visuelles. Jusque-là, on avait droit à une resucée, à peine correcte, du cinéma de Tony Scott. Mais Robert Rodriguez va une nouvelle fois partir en vrille, tant une des deux directions pouvait amener à un film à twist, ne serait-ce qu'un minimum réjouissant. Ici, on se retrouve à nouveau face à une bouillie informe de situations ridicules. Le film tente de nous accrocher via un suspense Hitchcockien et une tension érotique venant de Basic Instinct (1992), sortie de nulle part et totalement invraisemblable entre Rourke et Diana.
Dans le bourbier, se cachent des plans assez sympathiques.
Le film ne se dévoile être qu'un enchaînement de ces deux grandes références, reprises d'Inception et du cinéma d’Alfred Hitchcock (et au passage de Memento), à tour de rôle, dans un saupoudrage de retournements de situations où Rourke a soudainement des pouvoirs. Puis par la suite, on assiste à un grand twist, jouant sur la théâtralité des événements et la tromperie du monde qui nous était présenté jusque-là. Cependant, toute la scène de tension érotique avait déjà tiré les vers du nez de ce twist grotesque. Un sentiment de ligne droite qui finalement ne mène qu'à des idées “cools” qu’avait Rodriguez, lors de la conception de Hypnotic. La farce ne s'arrête pas là, car finalement, cela va se jouer à révéler quel personnage avait tout prévu depuis le début. Une espèce de mélange visuel, tentant désespérément de jouer sur la désorientation du spectateur, à coup de double jeu entre le monde théâtral et le monde fictif. Idée visuelle sympathique si, encore une fois, le traquenard qu'est le scénario n’avait pas cette fâcheuse tendance à n'être qu’un nid à twists.
Hypnotic est à l'image de beaucoup de films de Robert Rodriguez. Des moments d'extractions d’idées filmiques qui, soit ne s’emboîtent pas correctement, soit se résument à une pléthore de situations gênantes, où le cinéaste croit être un roi du twist, et qui aboutissent à la catastrophe narrative. Un ensemble confus et ne traçant pas l'idée claire d’une quelconque direction cinématographique. Le film apparaît au final comme une brochette de citations qui ne cherche pas à être plus que ça, quitte à tomber dans la copie carbone, de scènes renvoyant a d'autres œuvres, plus intéressantes (ou pas), auxquelles il semble vouloir rendre hommage.
La note du rédacteur : 1,5/5
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