Réalisation : Catherine Breillat
Scénario : Catherine Breillat, Pascal Bonitzer
Acteurs Principaux : Léa Drucker, Samuel Kircher, Olivier Rabourdin, Clotilde Courau
Sortie : 13 septembre 2023
Durée : 1 h 44
Genres : Drame, Thriller
Producteur : Saïd Ben Saïd
Société de distribution : Pyramide Distribution
Catherine Breillat est une cinéaste qui s’est toujours intéressée au traitement frontal de la sexualité féminine à l’écran que ce soit dans Anatomie de l’enfer (2004) où elle paie Rocco Siffredi pour se plier aux désirs d’Amira Casar, ou encore dans ses films autobiographiques tels qu’ A ma Soeur ! (2001) ou Abus de faiblesse (2013). Elle revient cette semaine après 10 ans d’absence avec L’été dernier (sélectionné en compétition officielle du 76ème Festival de Cannes) dans lequel elle délaisse le choc physique pour mieux décortiquer la psyché de ses personnages.
Résumé :
Anne (Léa Drucker), avocate renommée, vit en harmonie avec son mari Pierre (Olivier Rabourdin) et leurs filles de 6 et 7 ans (Serena Hu et Angela Chen). Un jour, Théo (Samuel Kircher), 17 ans, fils de Pierre d’un précédent mariage, emménage chez eux. Peu de temps après, il annonce à son père qu’il a une liaison avec Anne. Elle nie.
Critique :
l’Homme face à sa nature
Avant même d’introduire ses personnages, Breillat nous met directement en garde contre la violence de son monde. Entre une jeune fille abusée devant déposer plainte aux côtés de son père incrédule et une autre subissant la violence de son paternel malade, Anne se retrouve impliquée au cœur de deux valeurs qui la suivront tout au long de l’intrigue : la responsabilité et le consentement. La responsabilité qui l’empêche de blâmer son nouveau beau-fils pour préserver la stabilité de sa famille, et le consentement qui la retient de se livrer à lui et de céder à ses avances afin de se maintenir dans le cadre légal et ne pas salir son blason d’avocate. Car, si L’été dernier de Catherine Breillat prend le contrepied du film danois qu’elle remake (Queen of Hearts de May el-Toukhy sorti en 2019, dans lequel l’avocate mettait directement sa carrière en péril en allant draguer son beau-fils) mais n’en oublie pas les thématiques principales de son cinéma, notamment la déviance sexuelle.
Céder à la tentation, mais à quel prix ?
Un système triangulaire
Qui dit “film de Catherine Breillat” dit forcément “notion de malaise” et ce dernier est ici instauré par plusieurs triangles (à l’image du tatouage que se fait Léa Drucker en début de film) de personnages qui s'imbriquent et se détruisent les uns les autres. Des systèmes qui font de Théo le destructeur du couple de son père mais en même temps l’élément sacrifié par ce dernier.
Breillat dissèque la famille comme une institution malade au bord de l’éclat
“Et l'amour, par tes yeux devenu tout-puissant, rend déjà la vigueur à mon corps languissant.” (Corneil) Les yeux, le miroir de l’âme pour certains, sont ici les vecteurs de toutes les actions entreprises. Breillat délaisse pour la première fois les corps pour s'intéresser aux regards et épouser ainsi directement leurs points de vue. Illuminés par ce désir interdit qu’ils se portent ou désolés, ces visages sont les paysages sensibles auxquels nous pouvons nous rattacher. Et de la sensibilité, il y en a ! Il est effectivement rare que cette metteuse en scène filme les larmes à hauteur de corps, ce qui démultiplie l’émotion ressentie et fait de L’été dernier un choc sensoriel plus qu’un scandale cannois (auquel il n’a pas eu droit).
Léa Drucker jouissive dans son rôle de belle-mère malsaine
Après 10 ans d'absence dues à un AVC, l’immense Catherine Breillat revient en explorant un autre désir interdit dans un film plus naturaliste qui sent bon le cinéma de Pialat (pour lequel elle à écrit). Un film sensoriel déroutant mais qui peut constituer une excellente porte d’entrée à son cinéma que l’on affectionne tant.
La note du rédacteur : 4,5/5
L’ avis des autres rédacteurs :
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