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Photo du rédacteurAdam Herczalowski

[CRITIQUE] Les Graines du figuier sauvage : L'arbre de la révolution


Réalisation : Mohammad Rasoulof

Scénario :  Mohammad Rasoulof

Photographie : Pooyan Aghababaei

Montage : Andrew Bird

Musique : Karzan Mahmood

Acteurs Principaux :  

Sortie : 18 septembre 2024

Durée : 2h46

Genre : Drame

Société de production :  Run Way Pictures, Parallel45 et Arte France Cinéma (coproduction)

Société de distribution : Pyramide Distribution

 

Le cinéaste Mohammad Rasoulof s'est continuellement frotté au régime Iranien avec d'autres confrères réalisateurs notamment Jafar Panahi. Du long-métrage Les manuscrits ne brûlent pas (2013) sur les journalistes traqués par la république Islamique d'Iran à son pamphlet contre la peine de mort avec Le diable n'existe pas (2020). Au-delà de son statut de cinéaste engagé politiquement, il est surtout un conteur d'une situation politique en constante oppression. Condamnée à huit ans de prison pour entre autres "collusion contre la sécurité nationale", il fuit son pays et réussit à présenter son long-métrage tourné en clandestinité Les Graines du figuier sauvage durant la dernière édition du Festival de Cannes où il reçoit le prix spécial. Ce nouveau film est-il un nouveau coup d'éclat politique, une nouvelle graine planté au cœur d'un régime oppresseur ?  


Synopsis :  


"Iman vient d’être promu juge d’instruction au tribunal révolutionnaire de Téhéran quand un immense mouvement de protestations populaires commence à secouer le pays. Dépassé par l’ampleur des évènements, il se confronte à l’absurdité d’un système et à ses injustices mais décide de s’y conformer. A la maison, ses deux filles, Rezvan et Sana, étudiantes, soutiennent le mouvement avec virulence, tandis que sa femme, Najmeh, tente de ménager les deux camps. La paranoïa envahit Iman lorsque son arme de service disparait mystérieusement..."

 

Critique : 


Pistolet de Tchekhov


Le Ficus carica dont le mâle se fait appeler Figuier sauvage ou Caprifiguier, à la particularité d’avoir une durée de vie de près de 300 ans. Sa capacité de pollinisation de certains figuiers lui donne un pouvoir de croissance et d’existence assez conséquent. A l’image d’un régime que le cinéaste iranien Mohammad Rasoulof filme sous ses facettes de croissance permanente depuis la révolution de 1979. Le cinéaste se place cette fois-ci au cœur d’une famille dont le patriarche Iman (Missagh Zareh) se voit être promu juge d’instruction au tribunal révolutionnaire de Téhéran, au moment où le mouvement « Femme, Vie, Liberté » commence à secouer le pays. Le gros plan ouvrant le film voit le nouveau juge déchargeant son arme, laissant les balles tombées. Rasoulof met en image la graine plantée par le régime iranien, une arme servant d’outil d’un travail de répression, mais également d’élément narratif (fusil de Tchekhov), créant une progression puissamment didactique de la paranoïa au sein de la famille. Une famille dont les deux jeunes filles suivent la naissance des protestations au travers des écrans, observant leur paternel changer progressivement de comportement face aux décisions radicales que doit prendre Iman. Les Graines du figuier sauvage peut s’observer comme une continuité de son long-métrage précédent, Le diable n'existe pas (2020) parlant du libre arbitre et la naissance de la rébellion. Un désordre dans le système politique du pays que le cinéaste implante par le biais du personnage de Sadaf (Niousha Akhshi), ami de l’ainée de la famille Rezvan (Mahsa Rostami), qui se retrouve sous le feu d’une manifestation qui tourne mal. Propulsant les deux arbres en croissance dans la maison des dignitaires du régime en confrontation, quand la mère Najmeh (Soheila Golestani) s’occupera des blessures sur le visage de la jeune Sadaf causée par les décisions de répressions. La matriarche familiale étant jusque-là au centre des deux arbres en pleines croissances, celui du pouvoir iranien s’imprégnant dans la maison et la révolution naissante. Najmeh se retrouvera tirailler entre l'oppresseur masculin et la révolution féminine.


Corps enchainé


La graine fait naître cette révolution au cœur du régime qui est appuyés par les diverses vidéos réelles, que les filles regardent sur les réseaux sociaux, faisant nourrir une interrogation vitale sur la place qu’occupe leur père dans le fonctionnement de l’oppression se déroulant à Téhéran. Des images brillamment misent en parallèle par la télévision du salon qui diffusent des informations contradictoires, posant la question d’une fausse mise en scène et déclaration de la part des chaînes d’informations. Créant une confrontation entre le pouvoir en place et d’une jeunesse féminine iranienne, luttant pour disposer de leur corps, enlevant le voile étant vu comme un crime. Mohammad Rasoulof fait également acte de résistance au pouvoir autoritaire en basculant son long-métrage dans un thriller sur la paranoïa, le visage se mettant à découvert d’un père incarnant la figure d’oppression féminine du régime iranien, en déplaçant sa famille de force quand l’arme d’un travail de répression disparaît, tentant de détruire l’arbre d’un figuier femelle source d’un fruit nourrissant le changement. Un pays face à une colère qui se retrouve assouvie par une délocalisation étonnamment ludique dans le labyrinthe de Shining (1980) permettant la croissance d’un arbre de la révolution offrant les figuiers du libre arbitre nourrissant la fin du patriarcat.      


Stop au patriarcat


La note du rédacteur : 5/5 


 

L'avis des autres rédacteurs :


 



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